Intégration du Handicap

Intégration du Handicap

Chez BOULANGER, des salariés sourds à l’écoute des clients

Pour former et recruter des salariés sourds sur le métier de conseillers de vente polyvalents, BOULANGER articule un dispositif de Préparation opérationnelle à l’emploi collectif (POEC) et une formation en alternance. Une démarche d’intégration innovante et de longue haleine, dont la réussite s’explique par une démarche partenariale, conduite sous la houlette de l’Opcommerce.

Un vendeur sourd au contact des clients ? L’idée ne surprend plus chez BOULANGER. Depuis juin 2023, l’enseigne spécialiste des équipements de la maison en électroménager et multimédia accueille, dans plusieurs de ses magasins en Auvergne-Rhône-Alpes, cinq personnes déficientes auditives en formation pour occuper des postes de conseillers polyvalents en magasin. Au-delà d’un impact positif sur la société, cette initiative relève du bon sens économique. « Nos clients sourds n’ont pas accès aux informations sur l’usage de nos produits, et n’ont pas toujours accès à la lecture. Qui mieux que les personnes maîtrisant la langue des signes pour leur répondre ? » souligne Hélène VERHILLE, leader Diversité & Inclusion chez BOULANGER.

 Initiation à la langue des signes française

C’est l’un des magasins de l’enseigne, situé à Lyon, qui a donné l’exemple. En 2019, il recrute une personne sourde en logistique, accompagnée par l’AEFS, un organisme de formation spécialisé dans l’accompagnement de personnes sourdes. Séduite, la direction régionale de BOULANGER décide de reproduire l’expérience à plus grande échelle. Mais comment leur réserver le meilleur accueil ? En initiant les salariés de l’enseigne à la Langue des signes française (LSF), suggère l’AEFS. En effet, « sans communication, les sourds risquent l’isolement sur le lieu de travail », souligne Ginette COSTE, la directrice pédagogique et référente handicap de l’organisme de formation. Ni une ni deux, BOULANGER lance un appel pour apprendre aux collaborateurs les rudiments de la langue des signes en 2021. Surprise, de nombreux volontaires se manifestent. « Il y a eu une vraie émulation parmi les collaborateurs », salue Hélène VERHILLE.

Un service d’accessibilité

En 2023, BOULANGER passe à la vitesse supérieure en décidant de former des personnes sourdes à des emplois en magasin. Leur mission sera non seulement d’accueillir et conseiller tout client en magasin, mais aussi de répondre, via leur smartphone, aux appels vidéo des personnes sourdes qui souhaitent des renseignements sur les produits BOULANGER. L’enseigne imagine alors mettre sur pied un parcours en alternance pour les préparer au titre professionnel de « Conseiller relation client à distance ». Pour financer son projet et obtenir un appui logistique, elle se tourne vers l’Opcommerce. 

Réduire les risques de rupture

Soucieux de garantir les meilleures chances d’insertion aux personnes en situation de handicap, Grégory BACZYNSKI, Chef de projet territorial à la délégation Auvergne Rhône-Alpes de l’Opcommerce, suggère et convainc BOULANGER de faire précéder le contrat de professionnalisation d’une première étape : la Préparation opérationnelle à l’emploi collective, ou « POEC » (voir encadré ci-après). « Avant l’entrée en alternance, les candidats rencontrent ainsi l’entreprise et découvrent ses métiers, ce qui réduit le risque de rupture », souligne le chef de projet. « Pour garantir un vrai accompagnement, il fallait un parcours plus long », convient Hélène VERHILLE. 

Des CV enrichis

L’organisme de formation AEFS concocte alors un programme en 700 heures (soit 6 mois), adapté aux besoins de l’entreprise, qui prépare au titre de « Conseiller vendeur ». Le contenu de la formation a été pensé pour travailler en priorité les compétences de base des personnes sourdes : lire, écrire et compter. A la demande de BOULANGER, l’acquisition de plusieurs certifications était aussi au programme de cette POEC. Les douze personnes recrutées avec l’aide de France Travail ont ainsi validé des compétences de Sauveteur secouriste du travail (SST), obtenu leur Certificat d’aptitude à la conduite d’engins en sécurité (Caces) ou encore le certificat Voltaire qui atteste d’un bon niveau de maîtrise du français… Largement de quoi enrichir leur CV ! 

Des interprètes à disposition

A l’issue de la POEC, 100% des stagiaires étaient employables. Cinq stagiaires sur les douze ont choisi de poursuivre l’aventure et démarré le parcours en alternance en novembre 2023. Objectif : intégrer BOULANGER en CDI, à la fin de la formation prévue dans un an. L’enseigne s’efforce de soigner leur accueil dans les moindres détails. « Il a fallu veiller à rendre accessibles les moments de cohésion d’équipe », illustre Hélène VERHILLE. Lors des points d’équipe matinaux, les alternants utilisent donc une application de traduction en langue des signes. Lors de ce débrief, les objectifs commerciaux atteints sont aussi retranscrits par écrit. Les basiques de la langue des signes - comme « bonjour », ou « bon appétit » - sont aussi rappelés sur des affiches dans les endroits collectifs pour faciliter les échanges.

Et surtout, le centre de formation AEFS n’est jamais très loin. Son rôle est de jouer les intermédiaires avec l’employeur. « Sur leur application, les alternants peuvent nous appeler si ils veulent prévenir leur magasin qu’ils seront en retard à cause d’un bouchon, par exemple », souligne Ginette COSTE. Les alternants sont aussi accompagnés d’interprètes lors de réunions importantes. Ces services, facturés à l’entreprise, sont pris en charge par l’Agefiph (Association de gestion du fonds pour l’insertion des personnes handicapées).

Projet collectif en co-construction

L’expérience, toujours en cours, enthousiasme toutes les parties prenantes. « C’est un beau projet collectif en co-construction, où chacun a joué sa partition : l’AEFS, l’Opcommerce, mais aussi les collaborateurs de l’entreprise », souligne Hélène VERHILLE. « On a été hyperactifs, et l’enseigne également. On n’aurait pu rêver d’un meilleur partenaire », appuie Ginette COSTE, la directrice de l’AEFS, saluant la ténacité de l’entreprise. Et pour cause. « Une action comme celle-ci se fait sur un temps assez long et exige beaucoup d’anticipation », souligne-t-elle.

Inspirer et partager

Ce parcours innovant, réservé à quelques enseignes en Auvergne Rhône-Alpes, pourrait être étendu à d’autres régions à l’avenir. « L’objectif, c’est d’inspirer et de partager notre expérience », conclut Hélène VERHILLE. L’ex-ergothérapeute tient à faire progresser le taux de travailleurs handicapés dans son entreprise, qui atteint aujourd’hui 4,12 %.

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